Jacky Ickx est tout d'abord recruté par Ferrari en 1968 pour rejoindre la Scuderia en Formule 1, alors qu'il court en endurance dans l'équipe Gulf de John Wyer. Après avoir signé sa première victoire en Grand Prix en France le 7 juillet 1968, il rejoint en 1969 Brabham, dont l'un des partenaires n'est autre que le pétrolier Gulf. Avec deux victoires, il termine vice-champion du monde derrière Jackie Stewart. En 1970, Jacky Ickx devient l'un des très rares pilotes à être réengagé par Enzo Ferrari, cette fois sur la base d'un double programme en Formule 1 et en sports-prototypes.

Jacky Ickx s'est ainsi retrouvé au coeur des trois derniers grands duels de Ferrari aux 24 Heures. Lorsqu'il découvre la Sarthe en 1966 sur Ford GT40, Ferrari et Ford sont en train d'écrire une des plus belles pages de l'histoire mancelle. En 1970, la Ferrari 512 livre un duel grandiose face à la Porsche 917. Cette dernière offre au constructeur allemand sa première victoire aux 24 Heures du Mans, tandis que Jacky Ickx et son équipier suisse Peter Schetty sont contraints à l'abandon sur accident.

 

"Dans le duel Ford-Ferrari, il y avait aussi toute la tendresse qu'on a pu avoir pour le petit poucet italien avec ses belles voitures et ses beaux moteurs, se souvient Jacky Ickx. Ce qui a fait l'histoire des 24 Heures du Mans, ce sont ces grands duels, avec effectivement Matra et Ferrari. Il y a eu l'essor incroyable de Matra et de Jean-Luc Lagardère, qui a décidé de faire du sport automobile et y intégrant les connaissances aéronautiques de ses ingénieurs."

 

En 1973, face à Matra, Jacky Ickx et sa Ferrari 312 PB sont à la pointe du combat jusque dans les derniers moments de cette édition du 50e anniversaire des 24 Heures. Après avoir adopté un rythme prudent en début de course, le Belge et son coéquipier britannique Brian Redman donnent bien du fil à retordre aux futurs vainqueurs Henri Pescarolo et Gérard Larrousse. Leaders de la onzième à la dix-septième heure, ils renoncent finalement sur une casse moteur à moins de deux heures du drapeau à damier.

Fin 1973, Enzo Ferrari se laisse convaincre par son nouveau bras droit Luca di Montezemolo de renoncer aux sports-prototypes pour concentrer ses forces sur la reconquête de sa suprématie en Formule 1. Cette même année, Jacky Ickx part à son tour. De 1970 à 1973, il a également signé cinq de ses huit victoires en Formule 1 au volant d'une Ferrari.

 

"Je n'ai pas quitté Ferrari en mauvais termes, précise-t-il. Je suis parti car je voulais faire en même temps de la Formule 1 et de l'endurance (ce qui était assez courant pendant les années 1970), mais Ferrari ne m'offrait plus cette possibilité. A l'époque, la Formule 1 et les 24 Heures étaient traitées sur un pied d'égalité. C'est lorsque les choses se sont professionnalisées qu'il a fallu faire un choix. Je garde d'Enzo Ferrari le souvenir d'un homme infiniment affectueux et sensible. Je pense avoir été privilégié, car il a toujours fait preuve d'une grande patience à mon égard. J'ai toujours eu l'impression d'avoir reçu le meilleur de ce qui se passait à l'usine, même si l'intérêt était avant tout de voir gagner Ferrari, quel que soit le pilote. Enzo Ferrari a aussi connu l'époque où le sport automobile était dangereux. Je pense qu'il ne lui était pas possible de se lier d'amitié ou d'affection avec les pilotes qui couraient pour lui. Comme le risque d'accident était très important, il ne voulait pas être trop proche d'eux, pour ne pas avoir à en souffrir."

 

Pendant la deuxième moitié des années 1970, après deux saisons complètes en 1974 et 1975, les participations de Jacky Ickx en Formule 1 s'espacent au fil du temps jusqu'en 1979. Pendant cette période, les 24 Heures du Mans deviennent son véritable jardin, avec trois victoires consécutives en 1975 (sur Mirage), puis en 1976 et 1977 sur Porsche.

Commence alors la grande histoire d'amour entre le champion belge et le constructeur allemand, avec notamment le fantastique exploit des 24 Heures 1977... qui fera l'objet du prochain épisode de cette saga.

 

Cliquez ci-dessous pour découvrir les autres chapitres de cette conversation au long cours :

Interview saga Jacky Ickx (1) - La route des 24 Heures 1966

Interview saga Jacky Ickx (2) - 1969, la victoire en... marchant

 

Photo (Archives ACO) : Une image symbolique du grand duel des 24 Heures du Mans 1970, avec Jacky Ickx (Ferrari 512 S n°6) dans le sillage de la Porsche 917K n°23 des futurs vainqueurs Richard Attwood et Hans Herrmann.