Les voitures des 24 Heures du Mans du bois à la fibre de carbone
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Les voitures des 24 Heures du Mans du bois à la fibre de carbone

CENTENAIRE DES 24 HEURES – UNE HISTOIRE D’INNOVATIONS ⎮ Pour les ingénieurs, la compétition, et en particulier aux 24 h du Mans, se déroule bien en amont, sur la planche à dessin et dans l’atelier de fabrication. Charge à eux de trouver les meilleurs matériaux, plus légers, plus solides, plus faciles à façonner pour amener les voitures au meilleur niveau de performance durant 24 heures.

Il faut considérer la voiture en deux parties bien distinctes : châssis et carrosserie d’une part, moteur d’autre part.

Au tout début des 24 Heures du Mans, les voitures possèdent un châssis en acier sur lequel était boulonnée la carrosserie. Celle-ci fait appel aux tôles d’acier, au bois et à la toile. Plus légère que le bois et la tôle, cette dernière sert bien souvent de panneaux et de toit aux voitures. A noter, pour la petite histoire, que la Mini Marcos ayant participé avec Jean-Louis Marnat et Claude Ballot-Léna en 1966 est la dernière à reposer sur un châssis en grande partie en bois. Elle se classe malgré tout quinzième.

En 1923, le châssis de la Chenard et Walcker victorieuse en 1923 se compose de longerons et traverses de tôles d’acier embouties, tandis que la carrosserie elle-même est en tôles fine d’acier. Le moteur est en fonte, tout comme les carters de boite de vitesse et de différentiel.

C’est sur la base de ces éléments que la majorité des voitures vont rouler jusqu’à la guerre, l’aluminium venant malgré tout apporter sa légèreté et sa malléabilité tant sur des parties châssis que dans des pièces moteur.

La chasse aux kilos superflus

Jusqu’à l’arrêt de la course dû à la Seconde Guerre mondiale, architecture et matériaux vont doucement évoluer. Mais dès les années 1950, on découvre que, selon une formule désormais consacrée, « le poids, c’est l’ennemi ». Aussi est-il nécessaire de trouver des nouveaux matériaux, pour remplacer la fonte des moteurs et des tambours de freins, et surtout l’acier des châssis.

Beaucoup d’éléments sont alors convertis à l’aluminium, beaucoup plus léger que la fonte. Côté mécanique, les tambours de freins, puis plus tard les culasses et même les moteurs eux-mêmes adoptent ce matériau. Il en est de même pour les panneaux de carrosserie. L’aluminium est relativement facile à couler pour les pièces mécaniques, et la malléabilité des feuilles d’aluminium permet de modeler facilement les formes des carrosseries. Cependant il reste relativement souple et flexible, ce qui ne convient pas aux châssis tubulaires devenus la règle sur les prototypes des années 1950 et 1960.

Pour les tubes des châssis, on fait un temps appel au magnésium, mais cet alliage présente l’inconvénient d’être difficile à éteindre lorsqu’il prend feu. Il est même interdit après le tragique accident de 1955, où l’on prend conscience de ce problème avec l’incendie de la Mercedes de Pierre Levegh.

La solution arrive dans le courant des années 1960 grâce à Lotus, avec la technique des « baignoires », monocoques constituées de panneaux d’aluminium rivetés. En effet, la forme de monocoque et les couples de renforts répartis sur sa longueur permettent d’obtenir une meilleure rigidité que les tubes soudés entre eux des treillis tubulaires. Matra par exemple suit cette évolution en 1969, avec le châssis tubulaire d’acier de la 650. En 1971, c’est la technique de la monocoque en aluminium riveté qui est choisie avec la 660. En revanche Alfa Romeo et Porsche font beaucoup plus longtemps appel au châssis tubulaire, respectivement jusqu’à la 33 TT de 1972 et la 936 de 1977.

La composition des panneaux des châssis va rapidement évoluer dans les années 1970, avec des panneaux en nid d’abeille collés sur une feuille d’aluminium mince. La rigidité s’en trouve considérablement améliorée sans grever le poids.

Depuis les années 1960, les carrosseries se convertissent petit à petit à la fibre de verre : une ou plusieurs couches de fibre de verre collées avec de la résine dans de grands moules permet d’obtenir avec une grande facilité des formes douces et aérodynamiques. C’est beaucoup plus léger et facile à produire que des carrosseries en aluminium, qui nécessitent une importante main d’œuvre. Cette facilité de production va permettre de gérer un stock de pièces de rechange et de changer des panneaux entiers (capot avant ou arrière par exemple) plutôt que de tenter de les réparer en course.

Pour les moteurs et les boites de vitesses, l’aluminium se généralise. La finesse des moulages ayant progressé, on peut obtenir des parois suffisamment fines avec de l’aluminium, tout en gardant une bonne rigidité pour rendre le moteur porteur (c’est-à-dire faisant office de châssis sur la partie arrière de la voiture) et éviter un châssis trop lourd.

McLaren et la révolution du carbone

Les années 1990 voient l’arrivée des coques en fibre de carbone. Il s’agit d’un matériau composite résine et tissus de fibres de carbone appelé polymère à renfort fibre de carbone, ou en anglais CFRP. Après l’avoir expérimenté en Formule 1 (la MP4/1 dès l’année 1981), McLaren qui l’impose au Mans en 1995 avec la F1 GTR, qui remporte la course dès sa première participation aux mains de Yannick Dalmas, Masanori Sekiya et JJ Lehto. L’avantage de la fibre de carbone est double : une très grande résistance à la torsion, encaissant des contraintes sans destruction, et très grande légèreté par rapport à l’aluminium. Un inconvénient toutefois : la production d’une coque en carbone est longue à obtenir et le passage en four autoclave (haute température sous pression) est nécessaire pour assurer la bonne homogénéité des différents composants.

Le carbone a également été décliné pour assurer le freinage des voitures depuis la fin des années 1980. Les disques dans ce matériau supportent des températures extrêmement élevées et assurent une constance dans le freinage avant leur usure complète. Les freins en carbone sont même entrés dans la mémoire collective des 24 Heures du Mans : les disques de freins portés au rouge dans les gros freinages du circuit (Mulsanne, Indianapolis et Arnage, les chicanes Ford et la chicane Dunlop) sont un moment très prisé des spectateurs, conciliant innovation technologique et spectacle en piste.

PHOTOS : LE MANS (SARTHE, FRANCE), CIRCUIT DES 24 HEURES, 24 HEURES DU MANS - DE HAUT EN BAS (D.R. / ARCHIVES ACO) : l'évolution des matériaux de carrosserie châssis en trois instantanés, avec la tôle avec Chenard & Walcker (ici la voiture de Raoul Bachmann/Christian Dauvergne, 2e en 1923 derrière l'autre voiture de la marque française victorieuse de ces premières 24 Heures), châssis tubulaire et fibre de verre pour la Matra 650 (quatrième en 1969 aux mains de Jean-Pierre Beltoise/Piers Courage) et fibre de carbone pour la McLaren F1 GTR (ici la voiture de David Brabham/Pierre-Henri Raphanel/Lindsay Owen-Jones cinquième en 1996).

 

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