De son vivant, Jo Siffert était à la fois respecté par ses pairs et le public. Il était apprécié des Allemands en tant que pilote d'usine Porsche et l'un des plus éminents spécialistes de la Porsche 917, qu'il pilota aussi bien au Mans, en Championnat du Monde des Marques et aussi en Amérique du Nord en challenge CanAm. Les Britanniques n'ont pas oublié qu'il a remporté ses deux victoires en Formule 1 avec des écuries et constructeurs d'outre-Manche.

Et bien sûr, Jo Siffert était très populaire dans sa terre natale helvétique, figure de proue de son pays à cette époque aux côtés de ses compatriotes Clay Regazzoni et Herbert Müller, pour citer deux autres grands pilotes suisses des années 1970. "Et bien sûr les Fribourgeois que j’ai rencontrés fin mai, ajoute Michel Janvier. Proches de Siffert, ou amis d’enfance… Ils ont tous en eux une part de Jo, il faut être allé dans cette ville de Suisse pour comprendre la ferveur qui reste vivante autour de ce personnage romanesque, presque cinquante ans après sa disparition. Pour les Suisses d'un certain âge, Jo Siffert reste aussi important que peut l’être aujourd'hui le tennisman Roger Federer. Il ne faut pas oublier qu'il était de Fribourg, zone bilingue, et il reste énormément apprécié par les suisses germanophones, de même que par bon nombre d’Allemands par son lien avec Porsche. Les Anglais ne l’ont pas oublié non plus à travers ses saisons avec Lotus et Cooper de 1961 à 1969 (exception faite des années Brabham), et la dernière saison avec BRM. La vente record en août 2017 à Pebble Beach de la Porsche 917 ex-Siffert, et vedette du film "Le Mans" (un peu plus de 12 millions d'euros, ndlr), a remis sa légende d'actualité, à travers Steve McQueen. Pour beaucoup de gens qui ne connaissent pas Siffert, on parle de son lien avec l’acteur américain, et de suite, les choses s’éclairent. Pour les Suisses, il fait partie du paysage, comme avec ce radar près de Genève, où figure sa photo grand format ! Un nom de rue ici, ou un buste là…"

En écho à son partenaire dessinateur, le scénariste Olivier Marin ajoute une belle anecdote en guise de mot de la fin de cette saga : "Le jour où je suis venu à Fribourg rencontrer Philippe Siffert en 2012, c’était lors du festival de BD Bédémania qui a lieu juste à côté. A peine les organisateurs ont-ils su que j’avais eu un rendez-vous avec le fils du pilote, qu’une partie du public pendant le week-end de la manifestation me demandait déjà quand allait sortir la BD ! Je crois que ça résume bien l’aura de Jo ainsi que l’envie des Suisses que l'on parle toujours de lui..."

Illustration (Michel Janvier & Olivier Marin / Editions Paquet) : Aux 24 Heures du Mans 1972, la Porsche 908 LH n°60 aux couleurs de Jo Siffert ATE termine troisième des 24 Heures du Mans, aux mains de Michel Weber, Mario Casoni... et Reinhold Joest, qui est aujourd'hui le propriétaire d'écurie le plus victorieux dans la Sarthe. Un bel hommage à Jo Siffert, disparu dans un accident lors d'une course de Formule 1 hors championnat le 24 octobre 1971.